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Interdiction de filmer les policiers : la loi qui inquiète les militants anti violences policières

PPL : sécurité globale est une proposition de loi menée par deux députés LREM. Elle comporte plusieurs mesures notamment sur le renforcement des droits de la police municipale. Un des ses articles vise à interdire l’identification d’un fonctionnaire de la police dans le cadre d’une opération de police. Témoignages de militants qui luttent contre les violences policières.

Gerald Darmanin en avait fait une promesse. En septembre dernier, lors du congrès du syndicat Unsa Police, le ministre de l’Intérieur a martelé qu’« il faut interdire la diffusion des images des visages des policiers ». Déterminé, il a engagé une procédure accélérée pour faire adopter un texte de loi le lundi 26 octobre. L’article 24 de la proposition de loi stipule que : « Est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale lorsqu’il agit dans le cadre d’une opération de police. »

L’examen de la proposition de loi a commencé ce lundi 2 novembre en commission et se poursuivra toute la semaine. Le « Cop Watching » ou le fait de filmer les policiers lors de leur activité a permis de révéler des cas de violences policières. L’interpellation de Cédric Chouviat qui a conduit à sa mort avait été en partie filmée et diffusée sur les réseaux sociaux. Tout comme les violences qui émanaient des force de l’ordre lors des manifestations des « gilets jaunes ».

« Le but est que les policiers continuent à être violent en toute impunité »

Le journaliste David Dufresnes, répertorie et signale les cas d’abus des force de l’ordre notamment sur son compte twitter, @alloplacebeauvau. Le réalisateur d’ « Un pays qui se tient sage » un documentaire qui interroge la légitimité de l’usage de cette violence par l’État, a effectué de travail de documentation. C’est notamment en filmant et en diffusant sur les réseaux que le reporter passé par Mediapart et Libération a pu mettre en avant cette réalité. Aujourd’hui il milite activement sur les réseaux sociaux pour dénoncer la #PPLSécuritéGlobale.

Pour Amal Bentounsi, fondatrice du collectif « Urgence notre police assassine » le constat est simple, cette proposition de loi a une portée sociale importante. « Cette loi sécuritaire viole les principaux fondements de nos libertés. Notre liberté d’informer sur une police capable de tuer, tabasser et insulter. Le but de cette loi estque les policiers continuent à être violent en toute impunité. ». Amal qui a lutté pour obtenir la justice à la suite de la mort de son frère -tué d’une balle dans le dos par un policier- porte un discours tranchant.

Elle s’interroge sur le comportement que vont pouvoir adopter certains policiers. « Les policiers qui pour beaucoup empêchent de filmer, en cassant des téléphones, menaçant la population se sentent au dessus des lois. En refusant cela, ils ne se soumettent pas à la justice, alors ce projet de loi va laisser se proliférer les abus de la part des policiers. On se demande qu’elle va être le comportement des policiers s’ils savent qu’ils sont protégés en étant pas diffusés sur internet. »

Ce point de vue est partagé par l’avocat Arié Alimi. Le membre de la Ligue des Droits de l’Homme explique que « avec cette loi, l’Etat fait pour tout pour qu’il ne soit pas vu en train de train de commettre des violences. Ce texte est une entaille profonde dans un État de droit, une perte de défense. » L’avocat explique que cette proposition de loi va être une épreuve douloureuse dans les quartiers populaires en proie aux violences et abus policiers. « La seule défense dans les quartiers c’est le téléphone portable, un outil qui permettait de lutter face à la violence des forces de l’ordre. On sait que les banlieues ont été le théâtre des violences policières contemporaines, aujourd’hui cette loi vise à invisibiliser les violences policières dans les quartiers. » conclu l’avocat au bureau de Paris.

La liberté d’informer et la liberté de presse est impactée

Amal Bentounsi, explique que filmer est une arme. Celle qui a participé à la création de l’application « Urgence Notre urgence assassine » qui permet de récupérer et analyser les images filmées d’interventions des forces de l’ordre dîtes « violentes » explique que « cette surveillance citoyenne a permis de montrer le visage de la police aujourd’hui, des actions qu’elle mène ». Tout en pointant l’enjeu démocratique que représente cet article de loi. « Ne pas diffuser des images en direct est une suppression importante dans notre liberté d’informer » Amal termine en expliquant que même si cette loi est votée «  On continuera à diffuser pour nous défendre, avancer dans notre combat, même si il faudra passer par la justice. On fera tout pour vérifier la constitutionnalité de cette loi. »

Julien Pitinome, photo journaliste qui a milité pour lutter contre les violences policières estime que « cette proposition est la conséquence de la posture du ministre de l’Intérieur. Si on ne surveille pas la police ça devient une milice. C’est censé être la police pas des citoyens pas celle du gouvernement. La liberté d’informer prime sur tout, mais avec celle loi on bascule vers une logique liberticide ».

Le gouvernement évoque l’argumentaire de la protection des membres de force de l’ordre. Diffuser des images des policiers porterait atteinte à « l’intégrité psychique » des membres de force de l’ordre. Une notion assez vague qui ne tient pas selon les interrogés. Julien Pitinome affirme « qu’il n’y a pas de policiers qui se retrouvent en danger après que leur tête ait pu apparaître sur les réseaux sociaux ». Une idée reprise par l’avocat Arié Alimi pour qui « un policier n’est pas en danger si aucune information personnelle n’est transmise sur le net. ».

Julien Pitinome fait part de ses craintes sur les droits de la presse et évoque le récent projet « Capture » réalisé par Paulo Cirio. Une performance artistique dans laquelle il colle des portraits de policiers dans la rue pour les identifier et créer une base de données. En affichant ces photos il explique lutter contre les dangers de la reconnaissance faciale. Pour l’heure cette loi qui est étudiée par la commission a suscité des vives réactions. Une pétition pour faire retirer ce projet de loi a été mise en ligne. Une pétition qui a récolté plus de 550 000 signatures.

Raphael Jorge

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